• Il y a sans doute une grande prétention à se croire proche par l'esprit d'un artiste dont on n'a entendu parler que via quelques médias voyeuristes et obscènes Il y a sans doute une part d'orgueil à imaginer une proximité d'âme entre ce poète torturé et la vieille ménagère du dimanche que je suis peu à peu devenue, reniant toute propension à l'autodestruction chaque année davantage pour me fondre davantage dans une société et un ordre du monde qui ne me passionne pas.

    Ma rencontre avec Nicolas Ker, virtuelle, uniquement virtuelle, remonte à un ou deux ans et j'étais déjà totalement ligotée et prisonnière de mes occupations domestiques. C'est par le biais d'Arielle Dombasle évidemment, figure bien plus médiatique et qui m'a toujours personnellement fasciné. Car elle a réussi à construire son destin en dehors des voies toutes tracées du monde maternel et professionnel classique, à emprunter des  chemins bien plus tortueux et escarpés, sans, d'apparence, se brûler les ailes. A soixante-dix ans bientôt, elle trône toujours, dominant de sa silhouette anorexique et de sa chevelure de barbie le temps qui ne semble guère pouvoir la saisir. Figure de l'anorexique dans ce qu'elle a de plus positif: le refus de la dégradation corporelle, du temps qui passe, et l'extrème exigence vis à vis de soi même et de ses objectifs; J'aime Arielle Dombasle depuis qu'elle était une folle évaporée s'étonnant de voir un indien dans la ville, et depuis cette femme ne m'a jamais déçue. Et elle ne m'a jamais déçue lorsqu'elle m'a présenté Nicolas Ker, artiste pop rock qui aurait pû avoir un destin à la Nirvana mais est né probablement un peu trop tard et un peu trop chauve pour pouvoir jouer les rocks star; et tant mieux car oubliant l'image et le destroy, Nicolas Ker est resté  concentré sur la musique ce qui la rendu bien plus productif. Il n'y a pas une de ses chansons qui ne me touche intimement, qui ne me transperce. Depuis Les faubourgs de l'exil que j'ai écouté en boucle et intensément durant mes longues après-midi de garde d'enfant aux albums gothicos punks partagés avec Arielle Dombasle, tout m'a émue, touchée, transpercée. J'ai senti là la patte d'un homme profondément tourmenté et n'ayant trouvé qu'un seul échappatoire à sa souffrance: la musique; Qu'il soit mort à 50 ans m'étonne à peine, ce qui est plus étonnant, c'est comment il a pu rester vivant les 40 années précédentes, avec un tel désir de mort et un tel désespoir;

    Oui, j'aimais bien Nicolas Ker qui est sans doute ce qu'a fait de plus intègre et de plus rafraichissant notre époque en terme de musique, et tous les Benabars et les Raphael vivront vieux mais sans jamais égaler la diversité et le talent de ce poète maudit. En quelques heures, tout a déjà été dit sur Nicolas Ker et je découvre avec étonnement que tout le monde connaissait Nicolas Ker alors même que personne ne parlait jamais de lui. Sans doute n'était il que ce fantôme décharné que l'on écoute en silence après minuit une cigarette à la main mais dont on répugne à parler, car il incarne tout ce que l'époque actuelle veut fuir.

    Nicolas Ker, tu mas touchée en plein cœur, j'ai aimé ta noirceur et tes harmonies, tu as fait ton chemin sans jamais avoir peur de regarder la mort en face. Salut l'Artiste. 


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  • J'ai raté

    J'ai raté j'ai tout raté 

    Et ma gosse va se réveiller

    J'ai le bruit de la machine à laver dans les oreilles ça arrête pas d'tourner

    J'ai raté j'ai tout raté et j'en suis à désespérer

    Comment élever deux gosses quand tu crois pas en toi,

    quand tu crois pas en l'homme 

    quand tu crois pas en la société 

    quand tu penses que la vie c'est qu'une  réunion de dégénérés

    J'ai raté j'ai tout raté et j'ai peur de capituler

    J'ai peur de m'foutre en l'air

    j'aurais été qu'un courant d'air

    J'en ai marre des nanas des sorties d'école qui friment avec leurs ventres 

    Elles croient qu'elles sont des stars du top 50

    Parce que leur mec a oublié la capote et assure le service après-vente

    Elles sourient comme des barbies

    maquillées dans leurs 4X4 aux vitre teintées

    Mais  leur vie est triste à crever

    triste comme le bruit de ma machine à laver

    J'ai raté j'ai tout raté j'aurais mieux fait d' me faire sodomiser

    J'ai deux gosses à qui j'ai rien à apprendre, à qui j'ai rien à laisser

    La planète est déjà à moitié brûlée

    Il leur restera que des cadavres à bouffer

    J'ai raté j'ai tout rater, j'aurais mieux fait de pas m' lever

    j'ai le mal du supermarché, le mal des courses et de la télé

    j'en ai marre d'être femme au foyer

    Moi je voulais partir très loin  aller très haut 

    Moi je croyais qu'la vie c'est beau comme un film de Di caprio

    Y a ma machine à laver qui arrête pas d'tourner

    J'vais m'foutre en l'air j'te dis, j'aurais été qu'un courant d'air

    Y parait qu'on est malhonnêtes quand on n'a pas de tunes,

    comme ces rappeurs vendent leur haine pour pas vivre leur vie à Béthunes

    y parait qu'il faut être jeune pour avoir la haine

    Et moi je suis vieille et j'ai quand même la haine

    J'ai ma machine à laver qui s'arrête pas d'tourner, 

    J'ai plus d'état d'âmes depuis qu' j''ai avorté

    Un jour j'dirais à mes gosses pardon,

    pardons d'les avoir mis au monde comme on met quelqu'un en prison

     

     

     

     

     

     

     


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  • Je n'en peux plus! Plus des babys royals ou de  mannequins en herbe et  instagrameuses de tous poils sans leurs poils.. Je n'en peux plus d'avoir comme unique horizon le baby-bump (traduction pour les incultes n'ayant pas internet: bidoche affichée comme un trophée parce qu'elle contient un embryon composé pour moitié de sperme royal ou de sperme de millionnaire) de la dernière starlette à la mode, de je ne sais quelle actrice botoxée ou ex-starlette de la télé-réalité. Qu'est-ce qui justifie que l'on s'intéresse à ces filles et leurs ventres  hormis leur vernis colorés? Je ne sais même pas de quelle série, de quelle émission elles sortent, je crois comprendre qu'elles gagnent des sommes faramineuses juste en posant en bikini sur instagram ou en affichant leur petite bouée de grossesse comme si c'était le dernier voyage sur mars!!! Mais merde, là où je bosse, les gamines de 15 ans sont enceintes et ça continuera jusqu'à leurs 40, avec 10 ou 12 morveux au compteur, et personne ne semble s'en réjouïr outre mesure, au contraire, la PMI leur distribue des capotes en espérant mettre fin au désastre mais non, jamais, elles font comme leurs mères et comme leur soeurs, troquant toute liberté contre une ribambelle des gamins souvent bruyants et mal coiffés. Alors pourquoi est-ce que ce baby royal lui prend autant d'importance? Est-ce que l'utérus royal vaut plus que celui de toutes les nenettes de la banlieue française? Et pourquoi tous les médias, monde et figaro y compris, relayent chaque contraction comme si c'était d'une importance capitale? Combien on les paye pour ça? Alors voilà, je suis fatiguée de lire les grossesses de filles que je ne connais pas, que je ne connaîtrais jamais, de savoir tous les nausées et vomissements altiers qui sentent sans doute meilleurs que les nôtres puisqu'ils ont le privilège de figurer dans tous les moteurs de recherche, de connaître chaque prise de sang et chaque contraction, de sympathiser à distance pour des utérus qui ne sont pas les miens et qui produiront un gosse ni plus ni moins braillard que les nôtres! N'en jetez plus, il y en a bien assez chez moi déjà, bien assez où je travaille de grossesse désirées ou non désirées, faciles ou à risques, de morveux attendus ou pas mais dont personne ne parlera jamais, jamais, ni une fois nés ni une fois morts, qui resteront dans le silence assourdissant de leur pauvreté et de leur banlieue et dans le malheur ultime de ne pas avoir épousé le prince Charles et de ne rien connaitre aux moeurs de la Reine d'Angleterre qui a l'air d'être une sacrée chieuse soit dit en passant, à côté, avec ma belle-mère, j'ai de la chance! Laissez ces gosses grandir à l'écart des flash et des commentaires idiots et le monde entier s'en portera mieux, car afficher l'injustice du destin de façon aussi criante est un affront public que vous faites à chaque bébé né, lui, le pauvre, de mère inconnue.


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  • C'est un texte juridique qui vise à protéger les auteurs, une sorte de syndicat qui veut défendre leurs droits en terme de rémunération, de conditions d'accueil, etc... Pour recevoir des auteurs depuis longtemps, j'y étais plutôt favorable, je trouvais que la rémunération minimale prévue était un peu faible mais un bon garde fou contre les velléités des institutions qui visent à smicardiser des auteurs; nous avions discuter de cette charte avec pas mal d'auteurs et les retours étaient mitigés, eux en étaient contents, de notre côté, nous parlions du risque de voir disparaître des rencontres, des prix littéraires de Province, de renforcer encore le grand écart entre la scène culturelle parisienne où tout se passe et la banlieue lointaine où on ne trouve aucun roman, aucun auteur, aucun salon, un désert culturel qui fait le lit de tout un tas de choses en -isme et en -phobie que la raison m'invite à ne pas évoquer ici publiquement.

    Et puis il y a eu cet auteur qui alors qu'il avait obtenu la majorité de voix pour son roman a refusé catégoriquement de venir chez nous parce que nous ne respections pas la charte. Enfin catégoriquement, pas vraiment, il a commencé par négocier le salaire, plus élevé que la charte et cela m'a semblé raisonnable, puis les horaires, il ne pouvait plus arriver avant 13 h alors qu'une journée entière de rencontre était prévue, puis les critiques plus ou moins directes sur l'organisation de ce prix, les conditions, bref, rien ne convenait. Puis il a posté des messages sur les réseaux sociaux où il se moquait de notre prix, ses amis de facebook ont traité les organisateurs de branquignols, sans même nous avoir jamais rencontré, nous étions devenu sujet de moquerie et de ricanements dans le cercle germano-pratin. Plante les ces branquignols. Voilà à peu près ce qu'on lui disait. 

    Je n'ai pas pu répondre évidemment, pas pu répondre avec mes tripes parce qu'on ne rentre pas dans des débats houleux susceptibles de faire le buzz quand on est agent de petite catégorie pour une ville assez connue pour être politiquement à droite. Alors j'ai acté de son refus avec la plus grande neutralité et la plus grande froideur possible. 

    Je n'ai rien dit et j'ai ravalé ma salive.

    Je n'ai pas dit que son roman m'avait touchée et bouleversée au point que je n'avais pas pu l'achever et que c'était les enseignants qui m'avaient convaincue de l'inviter parce que j'avais trouvé le texte trop choquant, trop difficile, trop vrai. Que mon fils adorait ses BD et que cela avait fini de me convaincre que oui, on allait le choisir malgré son texte si sombre,  le genre de texte que je ne file pas aux mômes d 'ici d'habitude parce qu'ils savent déjà trop bien tout ça. 

    Je n'ai pas dit que si le prix avait eu l'air mal organisé à un moment, si il y avait eu du retard dans les courriers de confirmation, des hésitations sur les dates, c'est parce qu'il nous avait fallu batailler trois mois pour obtenir les subventions nécessaire à financer l'achat des romans pour les élèves. Que ces subventions n'existaient que si un nombre élevé de classes étaient concernées. Parce que nous sommes dans des quartiers où personne n'achètera un roman de sa poche, que les trois romans que les élèves ont lu cette année seront sans doute les seuls qu'ils liront de toute leur scolarité, parce que justement, il vont rencontrer le monsieur qui les a écrit et que c'est pour eux une motivation suffisante. Je n'ai pas dit que ce prix comme beaucoup d'autre était voué à disparaître par manques de subventions de l'éducation nationale. Je n'ai pas le droit de dire cela.

    Je n'ai pas dit que les élèves seraient déçus, avec cette impression à nouveau d'être des moins que rien, chez qui personne ne veut se déplacer, pas dit que la scission entre les deux France s'accélère de jours en jours, qu'ils parlent d'une façon qu'à Paris il peine à imaginer, qu'ils s'éloignent chaque jour à des années lumières de ces jeunes là, de cette France là. Qu'il y avait Paris et le reste du monde et que la culture était en train de devenir hors sol, strictement parisienne et sur quelques émissions télé, tandis qu'en banlieue, le smartphone et la PS 4 tiendraient lieu d'unique lien culturel.

    Je n'ai pas dit que moi aussi j'avais écrit un roman et que je comprenais les écrivains et leurs colères. Que je comprenais à quel point il était dur parfois de venir parler d'un roman qu'on a écrit avec ses tripes. Que moi-même j'en avais été sacrément incapable. Qu'il aurait juste dû me dire cela et que j'aurais compris.

    Je ne lui ai pas dit de rester au salon de Montreuil où il serait bien mieux accueilli. Où il y aurait plus d'argent. 

    Que moi aussi quand je racontais cette histoire mes amis de traitaient de con, de mec hors sol, de déconnecté. 

    Je ne lui ai pas dit que j'avais une môme d'un an malade en permanence depuis le début de l'année, que j'avais enchaîné nuits blanches et soirées aux urgences, que je devais faire mon travail à 100% en 80% par choix et que oui, parfois cela m'avait rendu moins disponible pour répondre aux mails. Les mères de famille ont-elles le droit de travailler? Je me le demande parfois, quand je vois mon degré d'efficacité les lendemains de nuit blanche, je me demande si ce système qui pousse les femmes à travailler et avoir des enfants en France n'est pas absurde, totalement.

    Je lui ai cité les auteurs qui étaient venus voir ces gamins là. Pour qu'il discute avec lui. Parce que je sais que tous avaient été impressionnés de venir mais tous étaient repartis légers et heureux, heureux de l'accueil qu'ils avaient reçu. Parce que ces gamins là, ce sont les seuls écrivains qu'ils voient, ailleurs que sur wikipédia alors ils sont intéressés, et polis, et émerveillés, et rien que pour ça je pense qu'il faut continuer.

     

     

     

     

     


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  • Je fais partie de la génération Y. celle en gros née dans les années 80. Et je constate chaque jour le fossé qui me sépare de la génération Z, née dans les années 90. Et de la difficulté de communiquer avec cette génération. Et du fait que je me sens vraiment comme une vieille conne aigrie en sa présence, tant nous ne partageons plus les mêmes références, les mêmes valeurs, les mêmes modes de vie. Si je caricature la génération des filles de mon époque, nous étions divisées en deux groupes: les filles star du collège un peu superficielles, souvent pas très douées à l'école mais avides de garçons, de clopes et de sorties en boîtes de nuits, celles qui avaient des scooters, une super popularité mais pas des supers résultats. Et puis les "autres", les bûcheuses, les pas forcément très drôles, un peu introverties, bien conscientes qu'il faudrait qu'elles bossent dix fois plus que les hommes pour faire leur place, pas spécialement à l'aise en leur présence, pas forcément très joviales mais passionnées par plein de domaines, le sport, les livres, la nature.... Dans ce groupe là, il n'était pas mal vu de n'être ni maquillé ni habillé à la mode, au contraire, nous mettions un soin particulier à se donner une apparence grunge, un peu destroy, pour se différencier des filles qui misaient tout sur le physique. Pas de maquillage, cheveux naturels ramassés en une simple queue de cheval, jean, baskets et tee-shirt de sport. c'était notre tenue habituelle et nous l'affichions sans honte, elle faisait partie de notre personnalité. les hommes, nous avions appris à nous en méfier, surtout les plus âgés que nous, et à afficher une moue glaçante quand ils se montraient collants ou pressants. Ce que la plupart du temps, eu égard à notre style vestimentaire, ils n'étaient pas. Nos parents, notamment mon père, avaient toujours eu ce discours là: ne te focalise pas sur les garçons, construit ta vie de façon indépendante. Alors la vie de couple, c'était pour quand on serait vieux. Ce qui comptait, c'étaient les études, les loisirs, les voyages, le sport,  les amis. Le mariage, je ne me rappelle pas y avoir pensé une seule seconde dans mon adolescence. Rêver de voyages à l'autre bout du monde de journalisme de littérature, de passions, oui, mais de mariage, de famille, que nenni. Et je crois que beaucoup de mes amies étaient comme moi. nous étions réfractaires à tout ce qui implique un couple ou une famille, traumatisés par notre vie dans des familles souvent nombreuses dont notre mère étaient un peu les esclaves plus ou moins consenties, nous n'aspirions qu'à une chose: la liberté. Vivre seul et libre. Nous étions franches. Dans nos premières expériences professionnelles, nous n'hésitions pas à nous montrer très critiques sur le monde du travail, comme nous l'étions sur le mode de vie des adultes, comme nous l'étions sur nos pairs. Oui, nous avions un esprit très critique, peut-être trop. Ou lucide selon le point de vue. Nous étions abreuvées de théories féministes à la Simone du Beauvoir et croyons à l'importance de se construire seul, sans famille, sans conjoint forcément. 

    Les filles de la génération Z me font penser à des petites poupées trop parfaites. Parfaitement coiffées, épilées, et maquillées, elles semblent à l'aise aussi bien professionnellement que socialement. Elles ont incroyablement intégré les règles de vie de notre société capitaliste pour la femme moderne: avoir un travail valorisant et payé, souvent à base de comm et nouvelles technologies, tout en étant mère de famille, d'enfants qui seront la plupart du temps en crèche ou nourrice dès deux mois. Leur rêve: faire un grand mariage avec plein de fleurs et de dragées, un compte intagram un un blog personnalisé et une liste de mariage en ligne! Reprenant toutes les traditions familiales du début du vingtième siècle, il ne semble leur poser aucun problème de se marier en grande pompe si possible en rendant jalouses toutes les autres. Lers relations de couples me semblent gnagnan et superficielles, elle appellent leur petit ami "mon bébé" ou mon chéri, d'une voix suave, font des moues adorables, tentent de désamorcer tous les débuts de conflits par des yeux doux trop maquillés et des paroles apaisantes issues de vidéos de développement personnel vues sur youtube. Avec nos mecs, et on pas nos "bébés" ou "chéris", nous étions franches, incisives, parfois brutales, nous ne minaudions pas mais quand un conflit arrivait, nous n'hésitions pas à au choix nous barrer, l'insulter copieusement, crier plus fort que lui, ou mieux le mettre à terre par un tâcle bien senti. Pas de "oh, désolée mamour", " ce n'est pas ce que je voulais dire, en reformulant, ce serait plutôt que "... quand nous reformulions, c'était avec des gros mots et pas d'excuse suaves, nous étions sans doutes dures mais aussi honne^tes et sans compromis. Il fallait nous prendre comme nous étions, un peu brutes de décoffrage, et pas tout en arrondissement d'angles et adoucissements hypocrites. Mais quand nous étions bien, ou heureuses, l'homme le savait, ces moments là étaient vrais, pas créés de toutes pièces pour un objectif d'appareil photos, car nous avions une intimité, une vie de couple que nous répugnions à partager, fut-ce avec nos plus proches amis. Il ne nous serait pas venu à l'idée de montrer nos photos de vacances à deux-cent-soixante amis, ces trésors là, nous les avions vécus ensemble, c'étaient notre jardin secret, et inutile d'e parler pour qu'il existe aux yeux des autres. en fait, nous nous fichions bien de ce que pensaient les autres de nos vacances, de notre couple, de notre mode de vie. Nous n'étions pas dociles, sans doutes aussi piquantes que des hérissons, mais quand nous aimions, nous aimions vraiment, avec passion, et l'autre devenait irremplaçable. Je note avec une certaine amertume que de plus en plus d'hommes de ma génération tendent à choisir leur compagne parmi la génération Z, plus docile, plus jolie, plus jeune, plus malléable sans doute.  A l'inverse, les filles de ma génération sont souvent vues comme trop intransigeantes, trop chiantes, trop exigeantes avec l'homme. Et beaucoup ont choisi de rester seules, ou de se séparer après plusieurs années de vie commune. 

     

    Les filles de la génération Z sont souvent aussi  brillantes professionnellement, dans des métiers impliquant une apparence parfaite comme la comm ou le web ou le commerce, et elles semblent maîtriser leur image toujours impeccablement lisse. elles sont positives, très positives, trop positives à mon gout, au point de perdre parfois tout esprit critique et toute lucidité, toute remise en question du système et de la construction capitaliste mondialisée qu'est notre monde. Elles ne rêvent plus d'être fonctionnaires ou salariées mais se lancent dans du business en ligne dont elles disent bien gagner leur vie, ou bien sont salariées pour de gros groupes dans le marketing et la com', sans aucun recul sur leur employeur, sans aucun doute sur la place de celui-ci dans le monde et son humanisme. Au contraire, elles en chantent les louanges même en privé et se refusent à tout esprit critique sur les fonctions qu'elles occupent, pourtant souvent proches de la vacuité.

    Elles sont parfois vegan, ou meetoo, ou adeptes de ce genre de mouvements à la mode, sans avoir vraiment le recul philosophique nécessaire, juste comme on adhère à un club parce que toutes ses copines en font partie (je ne veux pas manger des animaux parce que c'est maaal, et je ne veux pas qu'un garçon me touche les fesses si je ne l'y ai pas autorisé expressément par un accord écrit ou verbal). Je ne les trouve pas stupides pour autant, au contraire, je suis assez captivée par leur incroyable adaptation au monde de l'image et à la société individualiste et basée sur la représentation. A force de tenir des profils facebook ou instagram, elles sont devenus des espèces de profils facebook en live, ne parlant que de ce qui va bien, toujours positives, bien maquillées et souriantes, et ne remettant jamais en questions le mode de vie parfaite qu'elles se sont érigées. Si l'on soulève un peu de noirceur dans ce monde, elles vont se raccrocher à leur positive attitude, à tout ce qui va bien, sans jamais voir le mal nulle part. J'ai perdu mes repères avec ces filles là. Manger un steack est un crime. Se faire mettre une main au cul par un homme est une honte mais pas poser topless sur instagram de son propre chef. J'ai du mal avec leurs valeurs, leur culte du corps et du physique parfait, leur haute idée de la représentation d'elles-mêmes. Il me semble y voir sans réellement pouvoir mettre des chiffres et des statistiques derrière, une américanisation de notre société, tout dans le paraître, tout dans un positivisme forcé, affiché comme un signe d'appartenance à une classe sociale supérieure et un moyen de nourrir son cercle social. Elles me rappellent ce formidable film américain qu'était Américan Beauty. Ce monde où les apparences comptent avant tout.

    Elles m'ennuient un peu, à force d'être lisses comme un profil facebook, avec leurs maquillages parfaits, leurs mariages parfaits, leurs enfants parfaits. Suis-je jalouse? Je jalouse leur jeunesse et leur adaptation incroyable au monde actuel, mais je préfère à cete représentation  les tourments, les doutes, la dark face de notre génération, la génération Y, qui, ayant eu 20 ans à la fin du siècle, s'est laissée aller à l'angoisse, la nostalgie, les passions, comme la génération des romantiques de la fin du 19 ème. Il me semble que notre génération était plus à même de vivre les choses vraiment, intensément. Tout me paraissait plus réel que maintenant où chacun se cache derrière le culte de l'écran. Nous pouvions lire des romans de 500 pages sans être interrompus par x SMS.  Nous pouvions partir en voyage et couper court à toutes communication pendant trois mois sans qu'on lance un avis de recherche. Nous étions plus libre et dans un monde plus réel.

    Oui, la génération actuelle m'ennuie, j'ai envie d’ébouriffer les brushings trop parfaits d'aller chercher au fond des âmes, au fond des êtres, au fond des tripes ce qui'l y a derrière cette apparente satisfaction, derrière ce spectacle d'une vie ravissante. J'ai envie de les entendre râler mais ça n'arrive jamais. Est-ce qu'elles s'emmerdent? Est-ce qu'elles emmerdent leur copain à force d'être dans cette maîtrise absolue de leurs corps, apparences, vie, émotions? Est-ce qu'elles sont vraiment heureuses derrière leurs masques trop maquillés? Est-ce qu'elles aiment pour de vrai? Qui sont-elles vraiment?

     


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